Le Divan, La Lucarne des Ecrivains, Paris et quelques considérations sur le métier de vivre

"Garçon ne pleure pas" dans la vitrine de la Librairie Le Divan (Paris)

Un peu d'émotion tout de même de trouver mon dernier livre paru dans la vitrine d'une librairie parisienne réputée: Le Divan, avenue de la Convention (15). Nous avons passé une soirée chouette avec ce passionné de littérature qu'est Louis Pérot, jeune libraire chargé au Divan du secteur Poésie. Il a envie de défendre et d'attaquer en même temps. Il parle de son métier mais pas seulement, il parle des livres et des auteurs, il aime les écrivains, il fait connaître et a envie de rencontres. Nous sommes allés au bar avec lui après la lecture de Nasbinals (éditions Mainard) par Agnès Sourdillon et Claude Guerre, dîner ensuite d'un plat du Sud-ouest accompagné d'un vin de Nîmes dans une gargote comme presque seule Paris sait en inventer. Un endroit de la vie avec le tempérament qui lie les petites serviettes des habitués nouées et fichées dans des casiers en bois, un verre tout suite posé sur le comptoir pour patienter, la jeunesse insouciante mêlée à la solitude de vieux rentiers désabusés, l'efficacité d'un plongeur en apnée dans la vapeur de la cuisine, le sourire intact d'une serveuse des îles. Il nous a hébergé sous les toits au milieu de ses livres à lui, au huitième sans ascenseur avec vue par une lucarne sur la tour Montparnasse. Et j'ai dormi quelques bonnes heures, épuisé, comme quand j'avais vingt ans.

Paris avec Pierre Mainard. Nous la traversons du 19 ième en banlieue et retour. Voir des gens, poser des livres, parler de tout. S'ahurir de cette foule en mouvement, de ce flot, de ces vitrines partout,  comme si je n'y avais pas vécu, comme si c'était la première fois. Inhumanité dans cette misère que nous produisons et qui gangrène mon bonheur de regarder. Et la joie de ces enfants partout qui se sont adaptés à cet urbanisme total. De toutes les couleurs, de toutes les ethnies du Monde. Magnifiques enfants des rues.

Hubert Lucot, Christophe Massé à la Lucarne des Écrivains (photographie Marie Sarro droits réservés)

La Lucarne des Écrivains; l'efficacité d'Amel Louis le libraire qui présente Pierre Mainard et pousse la rencontre vers ce qui peut y avoir d'intense dans le métier d'éditeur. Hubert Lucot était présent et j'étais heureux de cette voix entêtée, quête politique pour dire que la littérature est aussi là pour proposer un avis qui va en déranger certains. Anne Calmels enfila un kimono pour lire des extraits de Tatami Pop de Nadia Porcar, des intonations venues du sud peuplèrent la librairie quelques minutes. Dire des mots pour Orlando de Rudder malheureusement absent. Retrouver ces ami(e)s venus tout spécialement et aller se perdre vers Clichy, un sex-shop, un bar, un sex-shop, un bar.. enfilade de sexe et d'alcool non stop pour tenir les hommes, contenir la lèpre des idées, maintenir une mortalité, des affaiblissements et faire de certaines vies un enfer des dépendances. Filer comme ça juste avant que toute la France ne regarde son équipe de rugby passer à côté, couper un quart du pays en deux,  puis un dernier regard sur quatre chevreuils alignés dans un champ en Tourraine avant que la nuit m'offre sa noire robe.