Parler de soie dans le ventre de la douceur
L'aube est là avec un goût de gelée royale sous la langue et une crainte enveloppe ses épaules; celle de voir la tempête planter ses dents dans le ciel. Tu ne cours pas, tu ne sautes pas les jardinières de fleurs, tu ne fais pas ce que tu savais faire quand tu étais heureux. Tu n'as jamais voulu le bonheur tu en as toujours eu peur. Repousser ces frontières. Car tout ne tient qu'à un fil. Ce fil tendu, ténu. La Police est d'accord, sur les boulevards, une voiture banalisée s'arrête à ta hauteur, trois hommes pour te demander tes papiers, regarder de quel pays es-tu ? De quelle couleur es-tu ? Malade, Méditerranéen ou simplement fatigué. Avec des gestes d'automates et des paroles du temps de la pire bureaucratie. Tu glisses ta main sous ta veste et ils pensent que tu cherches une arme. Parler de soie dans la douceur du ventre. Tu as envie de leur jeter au visage: Rimbaud est encore en ville et votre grand chef est amoureux d'une artiste non ? Tu enrages et pourtant tu es heureux là. L'instant est le pire et le plus beau des évènements. L'instant... tu te souviens ? Celui que tes années punk te demandaient de ne jamais quitter. L'instant du vol, du baiser volé, du cri, de la joie, du parcours sur les routes sans jamais s'arrêter. Là maintenant, tout de suite. Tu viens d'aimer et tu peux mourir, là, en quelques secondes, à l'instant, dans un fragment du temps. Et demain va être fait de douleurs. La seule qui se profile à l'horizon avec son air de mort, car tu n'as rien prévu et surtout pas que la vie se calcule.