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Christophe Massé Informations
12 décembre 2011

Magali Rizzo Sous La Tente (Bordeaux): Un texte

077

 

Magali Rizzo: Lumière & simplicité, convictions par le chas de l’aiguille. 

 

Aperçu sans se retourner les éléments qui ramènent au temps des enluminures de l’enfance, dans les herbes adventices du jardin, des fils de lumière d’un gyrophare courent.

Il est presque Minuit. D’une tente un homme sort. C’est la Belle Epoque qu’il croise et l’heure des ultimatums se rapproche. L’art toujours mieux que L’art.

 

À Malvina

 

Simplement avec du fil

Aujourd’hui nous pouvons pénétrer rapidement, il me semble, avec une plus grande souplesse qu’auparavant, dans le travail d’un artiste abordant, dans son champ d’investigation, avec simplicité, l’aspect de ce qui pourrait être sa picturalité. Et ceci peut-être, est le fait que d’autres artistes en défrichant toujours avec simplicité ont ouvert la voie pour nous permettre de nous sentir légers vis-à-vis de démarches qui réunissent des ensembles à la fois, comme: une occupation du terrain, une énergie spirituelle, une prise en compte sociale, la force de l’évocation.

C'est le cas pour moi avec Magali Rizzo ; je découvre dans son travail le surprenant résultat d’un effort de simple patience. Je le découvre aussi avec patience.

Tout de suite j’ai aimé le lien direct entre l’idée d’origine, un matériel donné et son aboutissement.

Tout de suite j’ai ressenti une infinie poésie traduite par le fil.

Récupération d’une idée, puis exercice méticuleux.

Enracinement dans l'archaïque position, les yeux baissés sur l’ouvrage.

Le temps et ses minutes s’égrènent. Il est important de faire attendre.

Minutie, persévérance, engourdissement, tétanie des doigts, souffrance.

Détermination.

Philosophie, sagesse, précision et environnement bucolique.

Elle entretient au fil de son temps une progression vers l’ailleurs, en conservant le sujet blotti au cœur de son écheveau. La représentation immédiatement portée ailleurs.

 

Mais je n’avais rien vu avant le bec d’Ambés 

 

On ne rencontre pas une personne. Une rencontre n’a peut-être pas d’intérêt, seulement si on rencontre un travail avec, en même temps, plus loin. Et si on rencontre un travail, c’est d’une certaine façon que l’on puisse croiser deux sources de travail qui en font une en s’enchevêtrant. Voici non seulement une aubaine, mais la configuration d’une partie de l’extase qui se prolonge en soi longtemps. Le tueur de trouble.

 

Certes il faut être dans des conditions adéquates et souffrir de quelque chose pour être en condition pour ce type de rencontre. Peut-être l’Art nous touche tellement qu’à partir de cet instant, des choses s’imbriquent pour la passion, la même qui fait aimer l’alcool.

En tous cas j’ai été touché par les deux images proposées par Magali Rizzo et qui finissaient par n’en faire qu’un. Un travail. Des versions originales.

Une position de deux.

Une image projetée par des moyens contemporains de la technique. Scannée, posée je ne sais où, renvoyée par le faisceau lumineux d’un projecteur relié à un ordinateur.

L’image découpée d’un lion. D’une tête de lion. Plus précisément, une ombre chinoise de la tête agrandie d’un lion perforant la première vitre du lieu pour se trouver sur le mur incluant une partie du radiateur et son ombre.

Et l’autre image à condition de penser cela dans ces termes alors qu’il s’agit bien là d’un drap accroché dans l’espace, éclairé de derrière par la lumière venue d’un spot dont on apercevait l’ampoule et le fil courant sur le mur jusqu’à la prise. Le drap était brodé par l’artiste, il était fait de deux parties : une comprenant la tête et le buste d’un homme allongé et l’autre les jambes.  

C’est de cet agencement qu’en gicla toute la poésie. L’intérêt de percevoir ce temps au-delà d’une histoire imposée jaillissait de la plus haute marche de l’esprit. Le partage des sentiments allant de l’un à l’autre ; de l’un pour évoquer la Jungle à ferraille, de l’autre celui diffus de toute la tendresse qui court après le fil et les heures répétées d’engourdissement à croire et penser qu’une vie passe par ce chas.

 

Je vois le Bec d’Ambés aujourd’hui de la rive droite de l’estuaire de la Gironde. La force d’un paysage me ramène à la puissance esthétique et poétique de l’Art. Son inéluctabilité et le choix ou non d’aller. Chaque molécule prendra sa charge dans le flux, à la séparation des courants, comme des images. Un point de vue dans l’abstraction du temps prendra sa source, et nous, nous devons nous en rendre compte.

Il ne reste rien jamais des instants sur les balançoires. Le souffle frais de l’air dans les cheveux et les yeux, desquels coulent des larmes qui sèchent en même temps sur les joues de l’enfance.

Le pavillon des expositions n’est qu’un aléatoire moment dans la vie d’un créateur comparé aux heures dans soi.

Magali Rizzo saute du strapontin de l’histoire du tissage, un pied sur les marches en velours de la salle obscure, elle se prépare à rassembler ses draps pour partir. 

Christophe Massé, Bordeaux-Perpignan Octobre/Décembre 2011.

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